Autour de Maïr. Hejer Charf, Canada, 2015, 91 minutes.
Ce film dresse le portrait de Maïr Verthuy, née le 16 avril 1931 au Pays de Galles et immigrée au Québec où elle deviendra enseignante de littérature de lange française à l’université Concordia. Mais dans cette présentation succincte, il faut préciser immédiatement le plus important : la littérature dont il s’agit est la littérature féminine, c’est-à-dire écrite par des femmes. En dehors de quelques classiques, Madame de Sévigné ou Georges Sand par exemple, cette littérature est systématiquement négligée dans l’enseignement universitaire jusque dans les années 1970. Ce sera le grand mérite de Maïr de lui accorder toute la place qu’elle mérite en ouvrant le premier cours de littérature francophone au féminin. Une institutionnalisation qui se poursuivra par la création en 1978 de l’institut Simone de Beauvoir, dont Maïr fut la première directrice, et qui joua un rôle fondamental dans le développement du féminisme au Québec, et dans l’ensemble du Canada.

Ce portrait donne bien sûr la première place à Maïr elle-même, dont nous pouvons apprécier toute l’étendue des connaissances, mais aussi la subtilité de ses analyses culturelles et politiques. C’est peu dire que ce qui compte avant tout pour elle, c’est la dimension féministe de son engagement, un engagement qui imprègnera l’ensemble de son travail d’enseignante. Mais cet engagement n’est surtout pas sectaire, bien au contraire. D’ailleurs il évoluera fortement au fil des années, pour gagner en nuances sur l’implication sociale et politique du féminisme comme orientation générale de la pensée et de l’action, notamment dans l’enseignement.

Le film de Hejer Charf est un film de rencontres. Comme son titre le laisse entendre, c’est tout le contexte culturel de l’engagement féministe, « autour » de Maïr, que nous découvrons. Les figures de la littérature, de Madeleine Gagnon à Hélène Monette, et tout ce qui a compté dans le monde littéraire québécois de la fin du XX° siècle. Des noms qui résonnent haut et fort, Monique Bosco, Jeanne Hyvrad, Nelly Arcan, Hélène Parmelin, pour ne citer que les plus connus. Si sa référence « incontournable », c’est bien sûr Simone de Beauvoir – que Maïr est loin d’idolâtrer tout en reconnaissant son importance, il faut aussi mentionne Benoite Groult, dont l’influence outre atlantique est tout aussi importante.

Nous pénétrons aussi dans l’intimité de Maïr. Au-delà de ses amitiés féminine et littéraire, la réalisatrice s’entretient aussi avec les membres de la famille, ses deux filles et ses petits-enfants, ce qui permet au passage d’évoquer la perspective politique du Québec libre. Hejer Charf évoque aussi le souvenir, toujours très présent, d’Armand, le mari de Maïr, disparu au moment du tournage du film.
Un film plein de souvenirs donc, mais qui est aussi tourné vers l’avenir. Si la nostalgie n’en est pas absente, il y a aussi dans la présence de Maïr à l’image une affirmation du dynamisme de la vie et des valeurs d’humanisme qui se manifestent dans tant d’œuvres littéraires et tout au long de la carrière de ces enseignantes et écrivaines.

Et puis il faut souligner le choix particulièrement judicieux des chansons d’Anne Sylvestre pour ponctuer le déroulement de la vie de Maïr et de ses luttes pour l’enseignement et le rayonnement de la littérature féminine.
Maïr Verthuy, restera, comme il est dit dans le film, « une grande figure du féminisme ».
Je ne connaissais pas cette écrivaine, très intéressant, merci.
IM
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