Portrait de cinéaste – Brault Michel.

Cinéaste canadien. (1928 – 2013)

Michel Brault est sans doute le cadreur le plus connu du cinéma documentaire mondial. Mais on ne peut réduira sa carrière à cette fonction, même s’il joua un rôle fondamental dans le développement du cinéma direct en France et au Québec. Il est aussi réalisateur, scénariste et producteur. Auteurs de films personnels, dont le plus connu est Les Ordres (1974, prix de la mise en scène lors du festival de Cannes 1975), qui traite de l’action du gouvernement canadien contre les indépendantistes québécois, il collabore comme coréalisateur avec les plus grands cinéastes québécois, de Gilles Groux (Les Raquetteurs, 1958) à Pierre Perrault (Pour la suite du monde 1963, L’Acadie, l’acadie ?!? 1971) en passant par Claude Jutra (Mon oncle Antoine, 1971). Il a longtemps travaillé à l’ONF (Office National du Film à Montréal) où il entre en 1956 et son nom reste légitiment attaché au succès mondial de cet organisme.

         L’homme « à la caméra », dans le cinéma des années 60 – 70, c’est lui ! Passionné de technique, il suit de près les perfectionnements apportés aux caméras légères (Eclair et Coutant) et la possibilité d’enregistrer un son synchrone. Mais la technique ne fait pas tout. Brault a aussi une vision claire de la portée du cinéma documentaire et il contribue, dans ses collaborations avec des réalisateurs importants, à développer une nouvelle esthétique.

         Il est appelé en France en 1961 par Jean Rouch avec qui il travaillera sur Chronique d’un été (1961) et sur lequel il exercera une influence déterminante. Dans la même année, il travaille avec Mario Ruspoli sur deux de ses films fondamentaux, Regard sur la folie et Les Inconnus de la terre. Que ce soit à l’intérieur de l’hôpital psychiatrique ou le long des chemins quasi désertiques de Lozère, il réalise des images véritablement vivantes qui confèrent une grande poésie à ces films.

         Michel Brault est devenu dans ces diverses expériences un virtuose de la caméra à l’épaule, dont il est souvent présenté comme l’inventeur. Il s’entrainait, dit-on, à courir tout en filmant, pour s’assurer d’une stabilité maximale. Mais son travail de faiseur d’images ne se réduit pas à des prouesses de type sportif. Brault filme au plus près des gens, dans un réel dont il fait lui-même partie avec sa caméra. Il entoure celle-ci d’un grand sac en tissu dont seul l’objectif dépasse, pour étouffer le bruit du moteur et pour la rendre plus discrète. Mais il ne vise nullement à pratiquer une sorte de caméra cachée. Les personnes qu’il filme savent toujours qu’elles sont filmées. Seulement le filmage n’est pas extérieur à la situation dans laquelle il intervient. Il y a toujours une sorte de contrat, une acceptation de la caméra et de son regard, entre celui qui filme et celui qui est filmé.

         Sans lui, le cinéma direct n’aurait sans doute pas existé, mais il n’en fut pas le seul « inventeur ». Un de ses grands mérites est d’avoir su collaborer avec les plus grands (les Perrault, Rouch et Ruspoli) et mettre son génie au service de ce qui fut une aventure collective.

Avatar de jean pierre Carrier

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

Laisser un commentaire