Truffaut et Léaud, Léaud et Truffaut.

François Truffaut, le scénario de ma vie. David Teboul, 2024, 93 minutes.

Le cinéma de Jean-Pierre Léaud. Cyril Leuthy, 2024, 63 minutes.

Deux films, un cinéaste et un acteur, son acteur.

François Truffaut et Jean-Pierre Léaud ont été liés une bonne partie de leur vie et de leur carrière cinématographique. Pourtant ces deux films sont indépendants l’un de l’autre et chacun peut être vu pour lui-même, sans opérer de comparaison ou de référence à l’autre. De toute façon, ils sont bien différents, même si bien sûr il y a quand même des points communs, des citations identiques et une ou deux séquences de film qu’on retrouve dans les deux.

Globalement, on peut dire que le film sur Truffaut est essentiellement biographique. On y découvre sa jeunesse, sa relation avec ses parents, avec ses amis et les personnalités du monde du cinéma (la séquence sur la rencontre avec Hitchcock est particulièrement intéressante). Tout cela est placé au premier plan. La filmographie n’est certes pas négligée, mais on a quand même l’impression que les films ne sont que des paravents derrière lesquels le cinéaste se cache.

De son côté, le film sur Léaud nous plonge beaucoup plus dans le monde du cinéma. C’est le métier d’acteur qui intéresse surtout Cyril Leuthy, en cherchant à rendre compte de la façon toute personnelle qu’a Léaud de l’exercicer. L’intérêt principal des deux films, c’est bien sûr la présence dominante du cinéaste et de l’acteur grâce à des archives, interviews et entretiens, surtout pour Truffaut et la présence effective devant la caméra pour Léaud. C’est d’ailleurs le point fort du film qui est consacré à ce dernier, cette présence reposant sur un dispositif original, dispositif qui revêt d’ailleurs un double aspect. D’une part Léaud réagit aujourd’hui aux événements du passé, et en même temps, de jeunes acteurs, comme dans une audition, sont appelés à rejouer quelques-unes des séquences les plus mythiques des films de Léaud, en particulier le rôle d’Antoine Doinel qui a fait en grande partie la notoriété aussi bien de Truffaut que de Léaud.

Le film de David Teboul est basé essentiellement sur un long entretien avec Claude de Givray tenant lieu pour Truffaut d’autobiographie. A quoi s’ajoute la lecture de lettres aux amis, et surtout au père. Une correspondance pleine de sous-entendus et d’accusations plus ou moins directes. La vie de Truffaut n’a jamais été simple.

Dans la parole de Truffaut, Jean-Pierre léaud ne semble tenir aucune place malgré l’importance pour le cinéaste de son premier film, Les 400 coups, où le jeune Léaud joue un rôle déterminant dans le succès, notamment à Cannes. Mais la saga Antoine Doinel n’apparaît que lors d’une rapide évocation de Baisers volés. Les autres films avec ce personnage sont passés sous silence. Par contre, dans le film sur Léaud, la relation avec Truffaut à travers le personnage d’Antoine Doinel tient une place déterminante. Tout le film est centré sur leur relation, le dépassement et l’abandon du personnage d’Antoine. L’éternel enfant devient enfin adulte en n’étant plus Doinel. L’évocation des derniers films de l’acteur, après une longue traversée du désert, est alors chargée d’émotion.

Deux films portraits qui rendent hommage à un cinéaste et un acteur qui ont été, disent-ils « sauvés » par le cinéma, et qui ont marqué leur époque. C’est en même temps une affirmation forte de l’amour du cinéma.

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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