Marguerite Yourcenar. Catherine Aventurier, 2025, 52 minutes.
Catherine Aventurier, auteur d’un film sur Virginia Woolf, et surtout spécialiste des carrières de peintres en duo d’amis (Bacon-Freud), ou de couple (Vassily Kandinsky et Gabriele Münter) était toute désignée pour réaliser ce documentaire sur Marguerite Yourcenar dans la série de François Brusnel « Les docs de la grande librairie » diffusée sur France 5. Elle nous propose donc un film sur Marguerite Yourcenar, mixant la vie et l’œuvre avec une grande précision. Une invitation à lire et relire les grands livres de l’écrivaine, Mémoires d’Hadrien ou l’Œuvre au noir, mais aussi les autres, moins connus mais tout aussi indispensables pour la littérature française du 20e siècle.
La vie de Marguerite est présentée dans l’ordre chronologique. Depuis l’enfance, au château de Mont-Noir. L’absence de la mère. Puis la relation particulière avec le père, jusqu’au décès dans l’île de Mount Desert Island où elle a passée presque tous les étés, les hivers étant consacrés au voyage, de sa longue (40 ans), relation avec Grâce Ttick. Et en passant, bien sûr, par toutes ses relations amoureuses avec les hommes. Point essentiel de cette vie, les engagements, pour l’écologie, les droits civiques et la cause animale, ainsi que sa bisexualité assumée.
Le film s’ouvre et se ferme presque sur l’évocation de l’élection de Marguerite à l’Académie française, première femme élue depuis 300 ans que l’institution existe. Une élection qui fit scandale dès l’annonce de sa candidature. Tout ce que l’académie pouvait contenir de passéiste et de réactionnaire rivalise de déclarations plus misogynes et même racistes les unes que les autres, jusqu’au »si nous acceptons une femme, la prochaine fois ce sera un nègre » dont il vaut mieux de ne pas citer l’auteur. De toute façon, en dehors du discours initial, Marguerite Yourcenar n’occupera jamais son fauteuil.
Le film réunit un grand nombre d’intervenants. Tous plus enthousiasme. Les uns que les autres. Des écrivains et écrivaines grands lecteurs de l’œuvre et fins connaisseurs de la vie. Amélie Nothomb, Cécile Coulon, Anne Berest, Christophe Bigot, ou Anne-Yvonne Julien, professeure à l’université de Poitiers. Le passage rapide de l’un à l’autre constitue l’essentiel du film, qui devient un portrait certes éclaté, mais très dynamique et donc agréable à suivre.
En dehors de la séquence concernant l’entrée à l’académie, la réalisatrice utilise peu d’archives. Les interventions de Marguerite sont peu nombreuses et toujours très – trop – courtes. Comme cet extrait de la longue conversation avec Bernard pivot. De l’autre côté, le filmage des voyages de Yourcenar et surtout de son lieu de résidence en Amérique, « Petite Plaisance » est particulièrement pertinent dans la mesure où il permet d’approcher concrètement cette vie de liberté et d’indépendance qui fut celle de l’écrivaine.
Un portrait enthousiaste, et enthousiasmant, sachant particulièrement toucher le grand public de la télévision. Il contribue ainsi à la diffusion de la grande littérature.
