INFLUENCEUSE

Girl Gang. Susanne Régina Meures. Suisse, 2022 98 minutes.

Léo gagne beaucoup d’argent. A 14 ans. Merci Internet. Merci les Réseaux sociaux. Merci You Tube !

Ses parents sont à ses côtés et surveillent le déroulement de sa carrière. Son père a quitté son job et l’accompagne dans chaque sortie. Sa mère la conseille le mieux qu’elle peut dans la production de contenus. Mais son succès, l’augmentation foudroyante du nombre de ses followers, elle ne le doit qu’à elle-même, à la fraicheur de ses vidéos, à la sincérité de ses messages. Du moins tant que les sponsors n’intervenaient pas trop.

 Ce qui lui arrive, être devenue une star sans même y avoir penser, pourrait arriver à n’importe quelle autre adolescente qui poste des vidéos sur You Tube. Toutes celles qui forment la foule anonyme de ses amies l’admirent sans doute, la jalouse sans doute aussi. Et incontestablement la prennent pour modèle. De toute façon, elles se ressemblent toutes. Elles ont les mêmes idées, les mêmes désirs, les mêmes goûts, en grande partie façonnés par la mode et les marques. Une manne qui tombe du ciel pour ces entreprises qui s’adressent à la jeunesse. Une nouvelle forme de publicité qui demande peu d’investissement. Léo qui fait grimper le chiffre d’affaires mérite bien quelques cadeau et un intéressement financier.

Girl gang est un film tout simple, évident. Il suffit d’être accepté auprès de Léo et de filmer sa vie d’adolescente d’aujourd’hui accro aux réseaux sociaux. Par exemple, réaliser ces plans impressionnants, à chaque prestation de Léo dans des centres commerciaux. La foule hurlante des gamines agrippées aux grilles des magasins avant leur ouverture. On se croirait presque revenu aux temps des Beatles. C’est à qui sera la premières à toucher leur idole et à faire un selfie dans ses bras. Elle est si gentille, si souriante ! Elle sait si bien cacher sa fatigue, et l’ennui dû à la répétition. Mais il faut bien donner un peu de soi.

L’intimité de Léo ne présente aucune surprise. Ses parents sont omni présents. Pour négocier avec les sponsors. Pour établir le programmes des déplacements. Pour que les posts sur internet ne dévient pas de la ligne qui marche et éviter tous les faux pas qui seraient immédiatement sanctionnés. Mais Léo est docile. Elle ne veut pas tout gâcher par des propos incontrôlés. Elle n’a aucune envie de jouer les protestataires ou les révoltés. Le monde dans lequel elle vit lui convient parfaitement.

Dans sa chambre, dans les moments où elle réussit à s’isoler, Léo aurait par moment la tentation de tout laisser tomber. C’est que la pression est de plus en plus forte. Mais elle sait ne pas se laisser aller et de toute façon ses parents veillent au grain. Les enjeux financiers sont énormes. Alors il ne faut pas faire preuve de faiblesse. L’avenir de Léo ? On verra plus tard. Pour l’instant il faut faire comme si tout allait bien.

Susanne Régina Meures nous livre ainsi un portrait impitoyable de cette jeunesse prisonnière des réseaux sociaux. Des jeunes filles qui ne pensent qu’à s’acheter le dernier rouge à lèvres ou le sac le plus cher. Sont-elles prêtes à faire n’importe quoi pour avoir de l’argent ? A côté de Léo, la cinéaste nous montre une de ses admiratrices inconditionnelles qui la suit partout. Mais Léo ne répond pas à ses sollicitations dans la vraie vie ce qui peu à peu, mais non sans mal, finira par l’éloigner de son idole. Que de temps perdu pour en arriver là.

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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