Notre corps. Claire Simon. 2023, 168 minutes.
Un film de femme, par une femme, sur des femmes, pour les femmes. Un film entièrement tourné dans un service dédié aux femmes dans un hôpital parisien. Tous les problèmes des femmes y sont abordés. On y rencontre des femmes qui ne peuvent pas avoir d’enfant et qui ont recours à la PMA, et des femmes enceintes qui ne veulent pas ou ne peuvent pas garder l’enfant et qui viennent ici pour avorter. Mais on assiste à deux accouchements, dont un par césarienne, et nous vivons ce moment toujours magique où le bébé est accueilli sur le ventre de sa mère.

De consultation en bloc opératoire (la séquence de l’opération avec le robot est une véritable démonstration de la modernité chirurgicale) nous prenons en compte la transition de genre, l’endométriose, les cancers, et en particulier le cancer du sein. Car comme dans tout hôpital il y a ici de la souffrance, une souffrance morale tout autant que physique. Une souffrance que le film ne cherche pas à cacher ou à minimiser. Une souffrance que de toute façon il n’est pas possible d’ignorer. Ici, elle est prise en compte avec la plus grande humanité possible. Et lorsque la mort est proche, inévitable, il s’agit alors de l’accepter en toute simplicité, pourrait-on dire. En ce sens, la dernière séquence dans l’hôpital, où la soignante caresse doucement la main de la vieille dame qu’il ne sera pas possible de sauver est un modèle du genre.

C’est peu dire que tout le film est placé sous le signe de l’empathie. Son titre, en un mot, nous disait déjà cette communauté de douleur, d’espoir et de désespoir, dans la vie et devant la mort. Ici, les soignants et soignantes ne semblent jamais débordés. Les conditions dans lesquelles ils exercent leur métier favorisent visiblement leur sérénité. Le film n’a pas pour objet de traiter des problèmes généraux de l’hôpital public en France, du manque de personnel aux difficultés financières. Ici c’est le patient, le malade, la femme qui est le seul sujet de préoccupation. Certains diront peut-être que c’est un modèle d’une autre époque, mais il est particulièrement réjouissant – et réconfortant – de voir qu’il peut encore exister.

Il y a bien pourtant une manifestation à la porte de l’hôpital. Elle concerne la dénonciation des violences obstétricales et gynécologiques, ces actes réalisés sans le consentement de la patiente. Des pancartes, une prise de parole, des plans qui nous rappellent que les femmes sont aussi trop souvent victimes de violence sexistes et sexuelles.

Dans sa visée d’exhaustivité de tous les problèmes féminins, Notre corps a une véritable portée universelle. Et ce n’est pas par hasard que la réalisatrice se retrouve elle-même de l’autre côté de la caméra. Atteinte d’un cancer du sein, elle ne laisse pas de côté sa maladie, dont le traitement vient prendre naturellement place dans le film. Le dernier plan, où elle quitte l’hôpital sur son vélo, annonçant que ses cheveux commencent à repousser, est non seulement une lueur d’espoir, mais aussi un véritable acte de foi dans la vie.
