Nuit de Tel Aviv

La Belle de Gaza. Yolande Zauberman, 2024, 76 minutes.

Un film nocturne, on pourrait presque dire lunaire. Les éclairages, les lumières, sont particulièrement travaillées. Les gros plans des visages magnifient l’expressivité de ces femmes qui ont été des hommes et qui font tout leur possible pour affirmer leur féminité. Il faut dire qu’elles ont bien des atouts pour y réussir parfaitement.

Tout ceci s’appuie sur une légende urbaine. Celle qu’on ne peut appeler que la Belle de Gaza a forgé sa réputation en venant à Tel-Aviv depuis Gaza à pied. Un exploit, même si cela à pu se passer en temps de paix, le film étant réalisé avant la guerre ouverte avec le Hamas.

Qui est cette belle ? Les trans que rencontre Zauberman peuvent sans doute toutes revendiquer ce titre. Belle, elles le sont aussi par leurs propos, puisque le film leur donne la parole. Un film construit comme une succession d’extraits d’entretiens entrecoupés de plans de la rue la plus chaude de la ville. Ce ne sont plus les visages qui sont au premier plan.

Faire un film sur les trans israéliennes qui se prostituent dans les rues de Tel-Aviv est un choix particulièrement osé, voire une véritable provocation. Mais on sait déjà que la cinéaste n’a pas peur du scandale. Ses deux précédents films – avec la Belle de Gaza il constitue une véritable trilogie de la nuit la trilogie du côté caché d’Israël – Would you have sex with an arab et M abordait déjà cette face noire de l’Etat juif en abordant directement la question du sexe et du viol dans le cadre une communauté ultra-orthodoxe. Pourtant ce troisième film ne peut pas être réduit à une simple provocation. Zauberman rencontre des personnes qu’elle sait rendre attachantes, de la « grand-mère » à celle qui se cache (un peu) derrière son voile. Et puis il y a cette difficulté de vivre qu’elles partagent toutes, cette difficulté d’être soi-même dans cette société qui est loin d’être tolérante. Ici comme dans beaucoup d’autres régions du monde, les trans sont victimes de discriminations, pire de violences pouvant aller jusqu’au meurtre.

Le film de Yolande Zoberman n’est pas un catalogue de revendications. Il nous montre simplement cette volonté de vivre fondée sur l’espoir d’une liberté, et de la paix pour tous. On ne peut pas ne pas y penser

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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