Police au quotidien.

Law and order. Frédérick Wiseman, USA, 1969, 81 minutes.

Law and Order, un des films de Wiseman qui a le plus contribué à forger sa réputation de cinéaste des institutions américaines ? Ici, la police. Mais le système policier n’est pas vraiment traité en tant que tel. Il n’est surtout pas analysé. Il s’agit bien plutôt de se plonger dans son quotidien sur le terrain, là où l’intervention de la police est nécessaire pour rétablir l’ordre. La loi, en définitive, n’est guère présente. En tout cas elle n’est pas énoncée. Globalement, elle semble se réduire à dénoncer tout ce qui perturbe, ou risque de perturber l’ordre.

Nous suivons donc les policiers au jour le jour dans leur travail. Beaucoup de plan sont filmés dans les voitures de police où sont audibles les échanges avec le commissariat et les appels ou directives d’intervention. Ces interventions ne se limitent pas à réprimer la délinquance. Les policiers doivent aussi venir en aide. à ceux qui en ont besoin, les victimes des infraction. Comme cette dame âgée à qui on a arraché le sac. Le policier retrouve l’objet, mais comme il avait prévu sans le portefeuille et l’argent qu’il contenait, quelques dollars. Mais le plus important pour la victime, c’est que les clés de son appartement ont disparu. Comment pourra-t-elle rentrer chez elle ? On ne le saura pas.

Cette absence de dénouement des événements nécessitant l’intervention de la police est aussi sensible dans une des situations significatives filmées par Wiseman. Une petite fille est perdue. Abandonnée peut-être par ses parents. Le policier qui s’occupe d’elle avec beaucoup de tac, de sympathie et presque d’affection ne cherche pas à savoir les tenants et les aboutissants de la situation. Et nous ne verrons pas les parents quand ils viendront, s’ils viennent, retrouver leur enfant.

Autre situation où l’enfant est au cœur du problème, un couple se de dispute, chacun de son côté, leur enfant. Le ton monte entre eux. Et le policier présent essaie de calmer les esprits. Il ne fait que répéter qu’il n’a pas le pouvoir lui permettant d’intervenir plus avant. Que c’est au juge qu’il appartient de décider qui gardera l’enfant. Du moins, si une procédure de divorce est enclenchée. Mais la justice n’est pas présente dans Law and order, ce serait l’objet d’un autre film.

Beaucoup de scènes sont traitées plutôt rapidement, ce qui ne sera plus le cas dans bien des films suivants de la carrière de Wiseman. À l’image de l’incipit, constitué par une succession rapide de gros plans de visages d’hommes (des portraits anthropométriques constituant les fichiers de ceux qui ont affaire à la police). Tous ces individus restent anonymes comme dans tout le film.

Le film est donc plutôt court, 1 h 20, pas plus. Il est jalonné de scènes récurrentes. Des portes sont enfoncées pour pénétrer dans des appartements. Des voitures de police se croisent. Et s’arrêtent l’une en face de l’autre pour permettre aux 2 policiers qui les conduisent d’échanger quelques propos sur leur activité. Les échanges restent plutôt anodins de toute façon ils n’ont pas le temps approfondir les situations,

Au final le film dresse un portrait de la police plutôt serein. Il ne s’agit pas de dénoncer, par exemple des violences policières, bien que la maîtrise et la fouille des suspects se font plutôt sans ménagement. Mais la police, et son action, est ici donnée comme utile et nécessaire ? Au fond, comme le dit l’un des postulants au métier, la motivation pour rentrer dans la police n’est pas de devenir un héros justicier, mais d’être utile aux autres. Une telle motivation existe elle encore aujourd’hui ?

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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