Violence Conjugale.

S’il sait que je suis là, il me tue. Brigitte Chevet, 2023, 52 minutes.

Les violences conjugales, allant jusqu’au féminicides, sont de plus en plus nombreuses. Un véritable fléau qu’il faut combattre par tous les moyens.

Ayant pris conscience de l’urgence, un médecin du service des urgences de l’hôpital de Saint-Malo a crée une consultation pour accueillir les femmes en danger dans leur propre couple et dans un premier temps pour recueillir leur parole. Un élément essentiel de santé public.

Le film de Brigitte Chevet restitue donc cette parole significative d’une souffrance profonde, vis-à-vis de laquelle les victimes sont souvent résignées et impuissante. Il leur faut beaucoup de courage pour venir dans ce lieu où l’anonymat leur est garanti. Un lieu où on ne leur demande rien. Mais où le médecin peut prendre à sa charge le signalement à la gendarmerie en vue d’un dépôt de pliante. Une démarche souvent nécessaire mais très difficile à effectuer.

Brigitte Chevet filme de face le médecin accompagné d’une assistante sociale. Un cadrage unique qu’on retrouve tout au long du film. Dans le contre-champ, elle filme les pieds ou les mains de la plaignante. Des plans qui disent tout de la douleur du calvaire qu’elles vivent au quotidien. Un quotidien marqué par les injures, les gifles, les coups. Une de ces femmes a été poussé dans l’escalier par son conjoint. Et tout cela, devant les enfants qui ne peuvent que souffrir de cette violence.

Et pourtant, ces hommes violents disent aimer leur femme. Si celle-ci tente de s’échapper, de se réfugier chez ses propres parents par exemple, beaucoup feront tout pour qu’elle revienne, jurant qu’ils vont changer. Mais ces promesses sont bien souvent vite oubliées. Et les femmes se laissent alors enfermer dans ce cercle où la violence a vite fait de revenir, succédant aux périodes de manifestation d’amour.

Le médecin fait donc souvent l’analyse de la situation vécue par la femme en face de lui. Son grand mérite c’est d’écouter tout ce qu’elle a à dire, et de comprendre au mieux les situations particulières mais qui se retrouvent souvent d’un cas à l’autre. Cette écoute est basée sur l’acceptation pleine et entière de la parole et des faits qu’elle rapporte. Ici il n’est pas question de fabulation. Ni même d’exagération. Ce serait plutôt le contraire qu’il faudrait mettre en évidence.

A aucun moment le film ne tente de dramatiser les situations. Il s’efforce d’en rester aux faits. Des faits inacceptables en eux-mêmes. Il contribue donc à briser le silence. Et montre à ces femmes en souffrance qu’elles peuvent recevoir de l’aide et qu’elles doivent en demander.

Le type d’action qui est présenté signifie alors clairement que la violence conjugale, comme toutes les violences faites aux femmes, n’est pas une fatalité et que le patriarcat sur lequel elles s’appuient commence à vaciller – même si la route est encore bien longue.

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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