La rage

La Rabbia. Pier Paolo Pasolini, Italie, 1963, 53 minutes.

La Rabbia est un film de commande, du producteur d’actualités cinématographiques Gastone Ferranti. Il demande à Pasolini « pourquoi cette peur d’une guerre partout dans le monde ? » Et il ouvre au cinéaste ses archives, depuis la fin de la guerre.

La Rabbia est donc un film d’archives, en noir et blanc. Une grande fresque de l’histoire mondiale de 1945 à 1962. Mais c’est surtout l’histoire des combats des peuples, combats pour la survie d’abord, mais aussi combat pour la liberté, l’émancipation collective. Un combat contre le colonialisme, sous le signe du socialisme.

Ferranti n’apprécia pas le film de Pasolini. Trop engagé. Trop à gauche. Alors il propose à un homme connu à droite de réaliser, à partir de la même question, une deuxième partie, une sorte de réponse à Pasolini ; ou plutôt un contre-champ, une autre vision. Ce que Pasolini refusera. La Rabbia en deux parties ne fut jamais diffusé.

La Rabbia de Pasolini s’ouvre sur les chars soviétiques venu à Budapest écraser les aspirations à la liberté du peuple Hongrois. Une intervention qui aura des répercussions dans toute l’Europe démocratique comme en témoigne l’incendie du siège du Parti Communiste Français à Paris.

Puis suivent les luttes d’indépendance des pays africains colonisés, le Congo belge en particulier ; la lutte et la prise du pouvoir par Castro à Cuba ; le couronnement de la Reine Elisabeth II d’Angleterre ; L’accès au siège pontifical de Jean XXIII ; la guerre d’Algérie ; le suicide de Marilyn Monroe ; la conquête de l’espace et le triomphe soviétique du premier homme envoyé dans l’espace.

Ainsi le film semble encadré par les deux faces de la révolution bolchévique !

Les choix de Pasolini sont clairs. Il ne vise pas l’exhaustivité. Il retient les faits qui peuvent marquer l’imagination des peuples. Son histoire est entièrement subjective. Sans prétention scientifique, ni même historique malgré l’ordre chronologique.

Le vingtième siècle de la Rabbia n’est pas encore celui que Pasolini décrira en 1975, juste avant son assassinat, dans La disparition des lucioles. Un enfer où il n’existe plus aucune lueur d’espoir. Ici, il y a encore quelques lumières et des fêtes. Mais n’ont-elles pas tendance à prendre la direction – irréversible – de la domination capitaliste universelle ?

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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