Sokhna Benga : Portrait – documentaire de l’une des femmes les plus marquantes de son temps. Ndeye Aminata Ndiaye, Sénégal, 2025.
Sockhna Benga est une écrivaine africaine, plus précisément sénégalaise. Elle n’est sans doute pas très connue de la majorité du public français. Mais ce film a précisément pour objectif de la faire connaître. De nous la présenter, en lui donnant la parole. Une excellente occasion de passer un moment en sa compagnie. Un moment bien agréable.
Le film repose sur un principe méthodologique simple. Mais en l’occurrence particulièrement efficace. Il s’agit de donner la parole à l’autrice. Le film est donc uniquement constitué de ses propos. Sans aucune autre intervention. Pas de commentaire. Pas d’interview de personnes tiers. Comme ceux qu’on trouve le plus souvent dans ce genre de portrait. Des spécialistes, deux dont la parole est là pour nous donner des informations sur la personne et son œuvre ? Mais surtout de dire sa vérité, c’est-à-dire ce que le spectateur est en droit d’attendre. Mais sans doute ce qu’il n’est pas capable de dégager par lui-même. La parole des experts se donne toujours comme la vérité, incontestable, absolue. Bien sûr, il y a dans beaucoup de portraits d’écrivains d’autres types d’intervenants qui ne se présente pas comme des spécialistes. Par exemple, des amis, la famille, ceux qui ont connu l’intéressé, qui l’ont fréquenté. Mais ceux-là aussi ont quelque chose à dire, d’important, de fondamental, d’irremplaçable. Et le risque, dans certains films, c’est que le spectateur soit plus ou moins noyé sous un flot d’interventions. Toutes plus uniques les unes que les autres. Qu’il ait donc à faire à un portrait tout fait. Complet. Achevé et définitif.
Ici, rien de tout cela, le portrait se construit petit à petit. Au fil de la parole de l’autrice, ou plutôt le spectateur est appelé à le construire lui-même à partir de ce qu’il reçoit de cette parole, par essence fragmentaire, parfois anecdotique, non théorisée en tout cas. Une parole qui va constituer une sorte de puzzle, à charge pour le spectateur de tenter de le construire, ce qui d’ailleurs n’est jamais sûr. La réussite complète est sans doute illusoire. Ce qui, après tout, est d’une bonne chose. Le but n’étant pas de découvrir, de redécouvrir une vérité cachée, mais préexistantes à laquelle seuls les plus perspicaces, les plus érudits seraient capables d’accéder.
Le portrait donc de l’écrivaine dont il s’agit dans le film de Ndeye Aminata Ndiaye, est un portrait de femme, une femme africaine, sûre d’elle-même et décontractée. Elle parle avec aisance, sans emphase, sans effet de style. Une parole simple. Presque toujours évidente. De sa vie, elle parle de son père, lui-même écrivain et qui sera déterminant dans son choix de se consacrer à l’écriture. Elle parle aussi de ses livres, pour les présenter bien sûr, évoquant les conditions, quelques conditions, dans lesquelles ils ont été écrits. L’importance pour elle de la mer par exemple. Elle est alors souvent filmée devant sa bibliothèque. Une de ces bibliothèques. Une quantité de livres impressionnante. Écrire est inconcevable sans la lecture.
Ndeye Aminata Ndiaye est une jeune cinéaste qui s’est consacrée jusqu’ici à réaliser des portraits d’écrivains ou d’autres artistes, des musiciens par exemple. Mais ce n’est qu’un début. Gageons que la suite de sa carrière sera plus diversifiée. Elle a à l’évidence les compétences et l’ardent désir de réussir dans le difficile monde du cinéma africain.
