Paris ville lumière, Paris ville musée. Le Paris d’aujourd’hui, celui d’hier (sous l’occupation ou pendant la guerre d’Algérie), le Paris éternel. Le Paris des quartiers où l’on vit comme dans un village. Celui de la foule anonyme. Le Paris de l’art, du luxe, des loisirs. Le Paris des SDF et de la misère. Le Paris de l’amour. Sans oublier la politique… Tous ces Paris, le cinéma documentaire nous les faits découvrir. Des films qui ne se contentent pas de raconter des histoires se passant à Paris. Des films qui révèlent l’âme de cette ville aux multiples facettes.
Tous ces films, classés ici par ordre alphabétique des titres, sont présents dans le Dictionnaire du cinéma documentaire (Editions Vendémiaire)
Ainsi squattent-ils de Marie Maffre
L’occupation par les militants de Jeudi noir, collectif créé en 2006, de deux immeubles parisiens, place des Vosges et avenue Matignon. Des immeubles inoccupés depuis de longues années, alors que le nombre de ceux qui sont à la rue, sans logement, est en constante augmentation. Des actions militantes qui se veulent exemplaires, dans la distribution de tracts dans les rues ou dans l’aménagement des appartements occupés, ou dans la résistance aux forces de polices lors de l’inévitable expulsion.
Amour rue de Lappe de Denis Gheerbrant
Un bistro dans une rue populaire du 11° arrondissement, près de la bastille. Une vie de village où tout le monde se connait. Un réveillon où l’on danse sur les tables. Et l’évocation du Balejo où l’on passe des nuits entières à tourner la valse ou danser le rock.
Assassinat d’une modiste de Catherine Bernstein
L’histoire d’une famille juive, à travers l’évocation d’un de ses membres, Odette Fanny Bernstein, dite Fanny Berger. Née en 1901 à Neuilly, dans une famille aisée, elle quittera ses parents à 23 ans et aura la hardiesse, non seulement de voler de ses propres ailes, mais surtout de fonder une entreprise artisanale. Modiste installée à Paris près des Champs Elysées (rue Balzac près du cinéma du même nom), elle deviendra riche et célèbre grâce à la création de chapeaux qui firent la mode avant-guerre et même au début de l’occupation.
Au bord du monde de Claus Drexel
La nuit surtout, sous les ponts ou dans les couloirs du métro, les « habitations » des SDF parisiens. Et en même temps, Paris la nuit, avec toutes ses lumières, avec ses monuments qui en font un musée. Mais un Paris vide, comme déserté par ses habitants. Il n’y a que des voitures, rien que des voitures qui filent le long de la Seine sans prêter la moindre attention à ceux qui dorment sous les ponts. Un Paris filmé en plans fixes, presque comme des cartes postales. Le contraste recherché avec la misère des SDF est évident.
Bonne-Nouvelle
Un quartier de Paris allant des Grands Boulevards au Sentier, en passant par la station de métro éponyme et les portes Saint-Martin et Saint-Denis. Un quartier filmé pour lui-même, les rues les trottoirs, les boulevards, les entrées des immeubles, le plus souvent en plans fixes, mais aussi en longs travellings sur les bâtiments et les commences vus à hauteur de voitures, rideaux de fer baissés pour la plupart. Un quartier où l’on sent la présence de la drogue au fond des ruelles. Et le film se termine Place de la Bastille, un certain 10 Mai 2001, un orage terrible ! « Le monde d’avant allait bientôt vaciller ».
Carnet de notes sur vêtements et villes
Une rencontre entre un cinéaste allemand (Wim Wenders) et un couturier japonais, Yohji Yamamoto. Une rencontre aussi entre deux villes, Paris et Tokyo, deux métropoles qui, dans les images du film, ont tendance à se confondre. Pourtant pour le japonais, Paris vu depuis le dernier étage du Centre Pompidou a quelque chose d’unique, « un air qu’il n’y a nulle part ailleurs ».
Chats perchés de Chris Marker
Paris peut être la ville de drôles d’explorations, comme partir à la recherche de chats jaunes et souriants, tagués un peu partout sur les murs de la capitale. Surprenantes découvertes pour qui sait lever les yeux vers les derniers étages des immeubles. Car ces chats sont toujours perchés bien haut. Dominant la ville, contemplant d’en haut sa vaine agitation, jetant sur les petites occupations de ses habitants un regard plein d’ironie et de moquerie. Mais la vie parisienne n’en finit pas de nous interroger. Dans les rues, le métro, la présence des SDF par exemple. Et puis l’actualité politique se rappelle très vite à nous, un certain 21 avril en particulier. Et Marker de retrouver son regard militant, aux côtés des manifestants, dans les cortèges protestataires, à l’école des slogans, attentif aux banderoles. Dans ce début de siècle et de millénaire, de quelle couleur est le fond de l’air ?
Chronique d’un été de Jean Rouch et Edgar Morin
Un des premiers micros-trottoirs dans l’histoire des médias ? Les réactions des parisiens sollicitées par la question « Etes-vous heureux » sont des plus diverses : il y a ceux qui évitent la caméra, ceux qui ne veulent pas répondre, ceux qui profèrent des banalités. Il y a même un agent de police qui voudrait bien, mais qui ne peut pas puisqu’il est en service !
Et puis il y a l’évocation des camps de concentration par Marceline, ancienne déportée, marchant place de la Concorde au milieu de la circulation, ce qui est particulièrement saisissant. De même, le long travelling sous la halle, où Marceline est laissée seule, de plus en plus éloignée de nous au fond de l’image, dans la profondeur de champ. Le Paris de l’émotion.
Daguerréotypes d’Agnès Varda
Une rue dans le XIV° arrondissement. Une maison dans cette rue, celle de la cinéaste. Cette maison est le lieu où tous les voyages dans tous les coins du monde finissent toujours par aboutir, le lieu où il faut revenir, pour se poser, se reposer, se ressourcer. Mais un lieu où il faut continuer à faire du cinéma car pour Agnès, il n’est pas possible de vivre sans filmer. Partir de la rue Daguerre pour aller explorer le monde (de Cuba à l’île de Noirmoutier en passant pas Los Angeles). Revenir à la rue Daguerre pour, de là, comprendre le monde.
Rue Daguerre (un des inventeurs de la photographie !) c’est la vie de village avec ses petits commerçants, le café du coin, les artisans boulangers ou bouchers, que l’on fréquente tous les jours. Une occasion de rencontres, d’échanges sur le quotidien, sur le temps qu’il fait, ou aussi au fil des années, du temps qui passe.
La Danse, le ballet de l’opéra de Paris de Frederick Wiseman.
L’art de la danse, dans ces deux lieux emblématiques que sont le Palais Garnier et l’Opéra Bastille. Si nous visitons l’intérieur des bâtiments jusque dans leur moindre détail, les plans de coupe nous montrent les toits de Paris, vus depuis celui de l’Opéra Garnie. Un Paris vu de haut, lumineux, ensoleillé, dont émergent le Sacré Cœur, la tour Montparnasse ou le dôme des Invalides.
Géographie humaine de Claire Simon
La gare du Nord à Paris. Une des plus grande gares du monde. La troisième, dit-on. Elle s’étale sur trois niveaux et accueille pratiquement tout ce qui peut rouler sur des rails, des trains les plus communs aux plus sophistiqués, TGV et autre Eurostar ; du métro au RER en passant par les trains de banlieues. Dans la gare, il y a ceux qui attendent, ceux qui marchent lentement, ceux qui courent pour ne pas rater leur train et ceux qui arrivent juste au moment où les portes se ferment. Il y en a qui téléphonent, qui prennent leur café ou mangent un sandwich. Quand les trains arrivent on entend leurs freins grincer. Quand ils partent une sonnerie retentit. Sur les quais, ceux qui ne partent pas font des gestes d’au revoir.
Hélène Berr. Une jeune fille dans Paris occupé de Jérôme Prieur
Le Paris de l’Occupation comme on l’a rarement vu. Par les images photographiques d’époque et surtout tous ces petits films amateurs, sans doute filmés par des Allemands, et qui comportent donc toujours un peu un point de vue touristique. Une promenade sur les quais de la Seine, un regard sur la Tour Effel, une vue sur un jardin depuis la fenêtre d’un appartement, des terrasses de café. Un Paris qui semble oublier la tragédie de la guerre. Mais les persécutions des juifs elles sont bien réelles.
Ici on noie les Algériens de Yasmina Adi
Le Paris de la guerre d’Algérie. La Seine, en plein cœur de Paris, le soir du 17 octobre 1961 où les forces de l’ordre répriment violemment une manifestation organisée par le FLN. Pour la deuxième fois consécutive, les Algériens de la région parisienne quitte leur banlieue pour se regrouper dans le centre de Paris, à l’Etoile, la Concorde, les Grands Boulevards, Saint Michel. Ils protestent contre la décision du gouvernement français d’imposer un couvre-feu aux arabes vivant en France, tous les soirs à partir de 20 heures. Les images d’actualité montrent parfaitement comment la police et les CRS sont intervenus pour empêcher la manifestation. Les Algériens sont arrêtés systématiquement à leur arrivée dans Paris et parqués sur des places, à l’Etoile ou à la Concorde. Ils seront ensuite enfermés au Palais des sports. Suites aux interrogatoires, certains seront embarqués à Orly à destination de l’Algérie.
Jaurès de Vincent Dieutre
Des images prises depuis la fenêtre de l’appartement de Jaurès, la station de métro. Les rues, les voitures, les passants, le métro, un immeuble en face, et surtout le canal en contrebas. Sous la voute Lafayette, il y a un campement improvisé. Des réfugiés afghans trouvent là un espace un peu protégé du froid en hiver pour passer la nuit.
Une Jeunesse amoureuse de François Caillat
Le Paris des premiers amours. Mais comment faire le récit cinématographique de ses amours de jeunesse quelques 30 ans après ? La solution est de filmer les lieux tels qu’ils sont aujourd’hui. Se dessine ainsi une géographie parisienne des amours, du pont de Bir-Hakeim à la place Gambetta, du jardin du Luxembourg au Marais. Les rues, les immeubles, les portes, les fenêtres des appartements. Les souvenirs. La Nostalgie. La rue des Rosiers devenue méconnaissable : « même le restaurant Goldenberg est fermé ».
Le Joli mai de Chris Marker et Pierre Lhomme
Mai 1962, la paix retrouvée. Le pré-générique montre de magnifiques vues en plongée depuis la tour Eiffel. Pour le reste, on voit beaucoup d’embouteillages, beaucoup de taudis, de ruelles étroites, de bidonvilles dans la proche banlieue ou ces nouveaux grands ensembles tout neufs mais dont on sent déjà qu’ils ne sont pas des réussites architecturales. Le noir et blanc accentue la noirceur des monuments et le temps sombre et pluvieux de ce mois anormalement froid n’arrange pas les choses. Dans les entretiens apparaissent successivement à l’écran : un tailleur et un bougnat du quartier Mouffetard, deux architectes, une mère de famille nombreuse à Aubervilliers, deux jeunes commis de bourse, les invités d’un cocktail, un chauffeur de taxi peintre amateur , un inventeur à la foire de Paris, un couple d’amoureux, trois sœurs sans profession, des cheminots en grève, deux ingénieurs-conseils, un étudiant africain, une costumière de théâtre aux Champs Elysées, un prêtre-ouvrier devenu militant syndicaliste, un jeune ouvrier algérien ayant occupé un poste de responsabilité dans le FNL. Un tableau original des parisiens.
Le Masque de Johan Van der Keuken
Eté 1989 à Paris, la célébration du bicentenaire de la Révolution française, avec ses feux d’artifice à la tout Effel, son défilé militaire aux champs Elysées, sa fête populaire à la Bastille et les publicités télévisées qui s’engouffrent dans ce contexte. Dans les rues de Paris, ou dans les gares la nuit, il y a des « sans domicile fixe ». Une opposition systématique entre l’affirmation réitérée des droits de l’homme et du citoyen et l’exclusion des plus démunis et de ceux qui sont sans travail.
Paris de Raymond Depardon
Les quais de la gare Saint-Lazare. De longs plans fixes de personnes pressées, entrevues un court instant quasiment en gros plan quand elles s’approchent de la caméra, mais ne la regardant jamais. L’arrivée d’un train déverse deux milles personnes sur le quai. Deux trains arrivant en même temps doublent ce chiffre, et ce flot humain s’écoule en quelques minutes… On dirait presque une image fixe, tant on a affaire au même plan, même si les personnes qui passent dans le cadre ne sont jamais les mêmes.
Paris à tout prix d’Yves Jeuland et Pascale Sauvage
L’élection à la mairie de Paris en 2001 est bien plus qu’une bataille politique. C’est une véritable guerre où tous les coups sont permis, une guerre entre amis d’hier, un affrontement dont les vaincus auront du mal à se relever. Cette guerre, le film ne la situe pas dans l’opposition classique des deux camps traditionnels de la vie politique française. La guerre ici éclate au sein même de chaque camp, pour la désignation des candidats et commence donc bien avant la campagne officielle, deux ans avant l’élection en fait.
Place de la République de Louis Malle
Le quartier République à Paris, autour de la place, est un quartier particulièrement animé, plutôt populaire, lieu de passage des Parisiens et des étrangers. On y rencontre toutes sortes de gens, des jeunes et des vieux, des travailleurs et des retraités, des personnes heureuses et d’autres pour qui les temps sont durs et qui n’hésitent pas à le dire. Tout le film se passe dans la rue, excepté le petit verre pris au café du coin avec une des rencontres, un guadeloupéen en l’occurrence.
Reporters de Raymond Depardon
Les photographes de presse et autres paparazzi dans les rues de Paris. Il ne se passe pas toujours des choses extraordinaires, mais il faut bien trouver l’occasion de faire quand même des images pour alimenter la demande grandissante de la presse magazine. Pour cela, il y a bien sûr les passages obligés, la routine, le conseil des ministres du mercredi dans la cour de l’Élysée, les visites chez les commençants du maire de Paris, Jacques Chirac. Il y a aussi la « planque » devant les hôtels de luxe, au cas où une star du showbiz serait de passage. Un aperçu du Paris « people ».