Slam

Les Enfants d’Hampâté Bâ. Emmanuelle Villard. France, 2011, 50 minutes.

         Souleymane Diamanka est Peul et poète. Il écrit en français. Il incarne le contact entre deux cultures. Souleymane est musicien slammeur. C’est un orfèvre du langage. Il joue avec les mots. S’inspirant de sa culture d’origine il tisse toutes sortes de correspondances entre l’ici et l’ailleurs, le proche et le lointain. Le langage est sa maison. Jamais cette formule n’a jamais été si bien incarnée.

         Emmanuelle Villard nous propose un portrait intimiste de ce poète profondément ancré dans la tradition mais aussi entièrement ouvert à la modernité. Le film débute par une rencontre entre Souleymane et un de ses anciens maîtres d’école, un de ceux qui ont marqué sa vie, qui a su reconnaître très tôt les potentialités dont il était porteur. Et qui a su l’aider à se révéler à lui-même. Mais la majorité du film le montre dans sa famille, en France ou en Afrique. Avec son père, il inventorie les cassettes audios et les vidéos réalisées par celui-ci et dans lesquelles il puise son inspiration. Il reprend un certain nombre d’extraits sonores qu’il incruste dans ses propres œuvres, concrétisant ainsi son cheminement, un parcours original entre des cultures différentes. On sent dans ces rencontres feutrées le respect du fils pour la culture de ses racines qu’il s’efforce de maintenir vivantes. Leur disparition serait une catastrophe, une perte irremplaçable. Et ce respect se double d’une profonde admiration. S’il est lui-même poète, c’est parce que sa mère, sans le savoir, est elle-même poète. Et Souleymane de reprendre des expressions de son langage si subtilement imagé, points de départ de ses propres créations.

         Les textes de Souleymane, le film nous en fait découvrir au moins trois. Trois moments forts du film. Le premier, débutant en voie off à la fin d’une rencontre avec ses parents se poursuit par un extraits d’émissions de télévision. Les deux autres sont principalement proposées en voix off sur des images d’immeubles de cités de banlieue. Une inscription simple dans le contexte social du slam de Souleymane.

         Le film se termine par une séquence réalisée dans un collège. Après s’être présenté, Souleymane propose aux élèves une sorte d’atelier d’écriture. Le montage élimine le travail des élèves pour n’en proposer que le résultat, des jeux avec les mots. On a l’impression, en écoutant la lecture que fait Souleymane des productions de ces jeunes garçons et filles qu’il est possible, et facile, pour tout un chacun, de devenir poète.

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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