L’évangile de la révolution. François-Xavier Drouet, France-Belgique, 2023, 115 minutes.
La révolution en Amérique du Sud est-elle possible ? Une réforme agraire désirée par tous les paysans, la fin de la pauvreté, de la faim. La conquête de la liberté, ce qui implique le renversement des dictatures. Une grande partie du continent résonne de ces cris.
Une révolution, oui. Mais par quel moyen ? Au début, la non-violence semble s’imposer, avec Martin Luther King et Gandhi comme références. Mais devant la répression sanglante de l’armée, les massacres aveugles, les emprisonnements et les meurtres, bien vite le recours à la lutte armée devient inévitable.
Mais la caractéristique principale, et originale, de ces luttes, c’est sa dimension religieuse. Ici, les révolutionnaires sont chrétiens, catholiques et protestants. Et leur aspiration à la justice trouve un appui, un soutien, dans la foi chrétienne et dans une bonne partie du clergé.
C’est ainsi qu’est née ce qu’il est convenu d’appeler La Théologie de la libération, théorisée au Salvador par celui qu’on appelle « le porte-voix des sans voix », Monseigneur Romero , qui sera assassiné par l’armée. Meurtre qui contribuera à en faire un héros.
Le film de F-X Drouet est à la fois un retour sur cette histoire mouvementée où la violence domine, et une illustration concrète de ces mouvements par la rencontre avec ceux qui l’on vécue et l’on menée, dans différents pays, le Salvador, le Brésil, le Nicaragua, le Mexique.
Un film d’archives, mais qui prend la forme d’une enquête personnelle, menée par un Européen fasciné par l’Amérique latine. Un cinéaste qui inscrit sa propre histoire personnelle – le commentaire en voix off est en première personne – dans l’histoire révolutionnaire du continent.
Dans ce tour du continent sui va du Salvador au Mexique en passant par le Brésil et le Nicaragua, Drouet présente de courts portraits des figures les plus connues et des mouvements qu’ils animent. Monseigneur Romero donc au Salvador, au Brésil l’Archevêque de Récife, Don Hélder Câmara, et le Mouvement des paysans sans terre (MST), les Sandinistes au Nicaragua, le sous-commandant Marcos au Mexique et le mouvement Zapatiste. Et bien d’autres, comme tous ces anonymes que le cinéaste retrouve et interroge. Un mélange très habilement construit d’évocation du passé par la présence des archives et les souvenirs des acteurs de l’histoire.
Tous ces mouvements se sont heurtés à des répression particulièrement sanglantes, où l’on voit l’armée tirer sur les foules lors de manifestations non violentes. L’appui des états Unis est alors déterminant. Dans la mesure où le gouvernement Reagan par exemple, n’hésite pas à armer et financer les dictatures en place.
La théologie de la libération a-elle un avenir devant elle ? F-X Drouet ne prend pas position. Mais le film se termine par l’évocation du développement au Brésil des Églises évangéliques. Et la tonalité générale de son film est plutôt tourné vers la nostalgie.
Cinéma du réel, Paris 2024
États généraux du film documentaire, Lussas 2024.
