Trafic de drogue

Stups. Alice Odiot et Jean-Robert Viallet, 2024, 86 minutes.

Palais de justice de Marseille, audience en comparution immédiate. Sont jugés des membres du réseau de trafic de drogue. Des hommes et des femmes, jeunes et moins jeunes, des guetteurs, des dealers, une « nourrice », de petites mains et de gros bonnets. Tous seront reconnus coupables et condamnés. Des peines de prison, le plus souvent entre 6 et 8 mois fermes. La justice fait son métier. Mais la lutte contre le trafic est sans fin.

Le film d’Alice Odiot et Jean-Robert Viallet nous plonge au cœur de ce défi immense : faire respecter la loi quand la drogue est partout dans les cités, des quartiers entiers. Une tâche qui semble presque dérisoire. Que deviendront ces trafiquants une fois leur peine purgée. Même s’il leur est interdit de revenir à Marseille, auront-ils les moyens de fuir ce monde de l’argent facile ? Pourront-ils échapper à la loi du milieu ?

Le le film se focalise sur le travail du juge. Un juge unique devant lequel sont traduits, les uns après les autres, presque à la chaîne, ces personnages qui essaient de défendre leurs causes, de se trouver des excuses en niant les faits contre toute évidence, cherchant à apitoyer le juge sur leurs conditions de vie leurs difficultés insupportables, leurs galères. Certains reconnaissent les faits qui leur sent reproché, mais ils essaient quand même de se présenter comme innocents. Ou du moins, ils font tout pour minimiser leur faute. S’ils ont enfreint la loi, ils le regrettent et les plus jeunes sont prêts à jurer qu’ils ne recommenceront pas, qu’ils regrettent leurs actes et qu’ils vont retrouver le droit chemin. Sont-ils sincères ? A l’évidence ils ne jouent pas tous leur rôle avec la même efficacité. Et les avocats ont parfois du mal à être eux aussi convaincants.

Dans cette succession de situations plus effrayantes les unes que les autres, le juge effectue sa tâche avec un calme à toute épreuve. Il rappelle les faits, s’appuyant sur les enquêtes de police et essayant par ses questions d’obtenir des précisions, démasquant avec une grande rigueur les contradictions des accusés. En même temps il écoute semble-t-il avec une grande ouverture d’esprit la description de l’Intérieur des conditions de vie invraisemblables qui ne laisse aux jeunes aucune chance de s’en sortir. Mais il sait parfaitement ne pas se laisser impressionner. La pitié ne fait pas partie de l’exercice de la justice.

Après une suspension d’audience pour délibération, le juge proclame le verdict, les condamnations. Certains condamnés paraissent presque stupéfaits. Ont-ils cru qu’ils pouvaient échapper à la prison. L’un d’eux laisse éclater sa colère, insultant le juge et la justice.

Une dernière séquence, plus courte, se déroule dans un tribunal pour mineurs. Les propos de la juge nous renvoient directement au dilemme qui est celui de toute justice : doit-elle être uniquement répressive ? Et les moyens pédagogiques dont elle dispose peuvent-ils être efficaces pour éviter les récidives. Lorsqu’il il faut protéger la société peut-elle prendre en compte les conditions de vie particulières de chaque accusé.

On sort du film en se demandant s’il existe ne serait-ce qu’un embryon de solution.

Fipadoc, Biarritz 2025.

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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