Apprendre. Claire Simon, 2024, 105 minutes.
À l’école, ce sont les élèves qui apprennent. Ils sont aidés pour cela par les enseignants dont la fonction, la profession, est donc d’enseigner. Apprendre et enseigner sont donc deux choses différentes, quoique complémentaires. Mais elles ne peuvent en aucun cas se confondre. Il y a, à l’école et en dehors de l’école, bien des apprentissages qui se font sans qu’il y ait enseignement. L’école est, elle, le lieu où il y a de l’enseignement et le plus souvent cet enseignement favorise l’apprentissage. Mais il y a bien des cas où il y a de l’enseignement sans qu’il y ait de l’apprentissage. Ou seulement pour quelques élèves. Un enseignement sans apprentissage. C’est ça le scandale.
Par son titre, Claire Simon place son film sous l’angle de l’apprentissage, donc des élèves, sur lesquels elle va se focaliser en priorité, les filmant comme on dit à « hauteur d’enfant ». Et cela, bien sûr, nous rappelle un de ses premiers films, celui en tout cas qui l’a rendu célèbre. Récréation. Sauf que cette fois-ci, nous entrons dans la classe. Là où il y a aussi des enseignants. Ces adultes qui ont un rôle bien particulier.
Qu’apprend-on à l’école primaire ? A lire, écrire, compter comme out le monde l’affirme. À quoi il faut ajouter dans la poursuite de la maternelle, parler. Le langage joue un rôle essentiel dans la poursuite de la scolarité, surtout bien sûr pour les enfants dont le Français n’est pas la langue maternelle.
Sur tous ces aspects, le film de claire Simon ne se hasarde pas à proposer des pistes pédagogiques. La réalisatrice ne s’aventure pas dans le domaine de la théorie. Son objectif est bien plutôt de nous faire réfléchir, de faire réfléchir les parents en particulier, tous les adultes qui ont souvent des souvenirs flous, souvent brouillés de leur propre scolarité. L’école évolue sans cesse et le cinéma peut jouer un rôle important au niveau de l’information.
À côté du rôle strictement scolaire, les enseignants aujourd’hui ont de plus en plus à se confronter à une autre exigence sociale, l’éducation ! Souvent en complément ou en remplacement du rôle de la famille, souvent défaillante dans les quartiers difficiles. S’il faut apprendre à apprendre aux élèves avec tout ce qu’exige le « métier d’élève ». Il faut aussi leur apprendre à devenir citoyen. Une citoyenneté qui peut s’exercer dès le plus jeune âge. La gestion des relations sociales. Et de ce qu’il est convenu d’appeler le vivre ensemble
Il y a dans le film de Claire Simon une séquence surprenante, qui peut paraître au premier abord incongrue, la visite d’élèves de l’école Alsacienne de Paris. Une rencontre entre des élèves de milieux et de classes sociale bien différents. D’un côté, l’école Makarenko d’Ivry-Sur-Seine ; de l’autre. Une école privée dans le 16e arrondissement de Paris. Mais très vite, nous nous rendons compte qu’il s’agit d’un projet pédagogique extrêmement porteur pour les deux côtés, un projet qui ouvre l’esprit des enfants. Qui élargit leur monde en sortant de leur vision habituelle. Une grande leçon de relativité. Comme pour les croyances religieuses. Mes croyances sont ma vérité, mais je n’ai pas le droit de les imposer aux autres !
Claire Simon sait parfaitement filmer les enfants. Les enfants, nous les voyons vivre lors scolarité, grandir, s’ouvrir au monde et aux autres. Une scolarité complexe avec ses joies et ses échecs, ses difficultés et ses réussites. Le plaisir qu’éprouve ces écoliers sous le pont de Paris lors de la visite en bateau mouche fait chaud au cœur.
Grâce à l’école et aux enseignants, ces enfants ont un avenir. Même si le déterminisme social n’est pas aboli comme par miracle. Ils ne sont pas non plus condamnés à l’échec. Un film qui, dans la morosité ambiante, nous pousse à l’optimisme.
