Nothingwood de Sonia Kronlund
Comment la passion du cinéma se joue de la guerre et de l’obscurantisme dans un pays qui essaie de vivre quand même. Depuis trente ans Salim Shaheen – aux allures de gros bouffon- tourne ses films avec des bouts de ficelles et des copains, malgré les talibans, les bombardements et les attentats. Résultat décalé et exotique voire dérangeant, garanti, pour tout cinéphile européen … Ce cinéma afghan dont on ne voit que des bribes ne s’apparente ni à du Godard, ni aux Monty Python ; on lorgne plutôt du côté des « Charlots », version Bollywood. Mais ce n’est évidemment pas le sujet du film. Et au-delà du parcours du cinéaste, on en apprend aussi, mine de rien, autant sur l’Afghanistan que sur son cinéma : la réalisatrice Sonia Kronlund – qui parle la langue de ses interlocuteurs et intervient parfois dans le film – est une spécialiste de la région. Pour une fois, elle voulait nous montrer autre chose qu’un pays en ruines. J’appréciais déjà beaucoup ses documentaires « audio », là, c’est aussi une réussite. Même si certains n’attribueront à ce film qu’un statut de « curiosité » (ambiguë).
Texte de Anne-Sylvie Moretti