C COMME CABANE

Zeliha’s Hütte. Gabriela Gyr, Suisse, 2020,  44 minutes.

Du vent, beaucoup de vent. On l’entend pendant tout le film dans les feuillages ; on le voit agiter les tentes des campements. Et il faut sans cesse reclouer les tôles des toits de la maison pour qu’elles ne s’envolent pas.

Une maison ? Plutôt une cabane, construite en briques certes, mais qui semble quand même un peu bricolée. Son habitante la trouve à son goût, suffisamment confortable. Et puis, elle est érigée sur la terre des ancêtres. Et cela, pour Zeliha, ça n’a pas de prix.

A la retraite, Zeliha s’est retirée dans les montagnes où ont vécu ses parents et ses grands-parents. Elle y vit seule. Mais depuis peu, des cousins sont venus s’installer à proximité. De quoi la rassurer la nuit et apaiser un peu sa solitude.

Nous sommes dans les montagnes de la région de Dersim, la partie orientale de la Turquie, là où le Tigre et l’Euphrate prennent leur source. Une région région peuplée traditionnellement par les Kurdes Alévis. Une région dont les Turcs ont toujours voulu les chasser. Le grand-père de Zeliha, Seyid Reza, s’est révolté contre le pouvoir. C’est pour avoir lancé un mouvement de résistance qu’il fut exécuté.

Le film est le, portrait de cette femme qui incarne à elle seule la mémoire d’un peuple persécuté. Un portrait où elle rayonne de sérénité. Ses seuls moments de colère, c’est lorsqu’on vient creuser avec un bulldozer sur ses terres sans l’avoir prévenue. Le reste du temps, elle cultive son jardin et nourrit ses chats. Mais sa détermination pour résister aux tentatives pour la chasser de ses terres est immense. Elle ira jusqu’au bout pour défendre ses droits.

Le film de Gabriela Gyr est donc aussi l’évication d’une résistance. Résistance aux tentatives successives dans l’histoire, depuis les années 1920, d’extermination d’un peuple et de confiscation de leur terre. La statue de Seyid Reza, est pourtant toujours restée debout dans la ville. Tout un symbole.

Filmer les paysages grandioses de ces montagnes presque désertiques est un geste de soutien à un peuple qui ne demande qu’une chose, vivre en paix sur la terre de leurs ancêtres.

Traces de vie 2020

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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