C COMME CREATION

Boca Ciega. Itziar Leemans, Espagne, 2020, 65 minutes.

Le portrait d’un artiste. Un peintre, Thomas Henriot. Un peintre français qui vit à Cuba. En fait il évoque ses voyages pratiquement dans le monde entier, et on le retrouvera à Paris. Mais c’est à Cuba que la réalisatrice le filme dans son activité artistique. Et dans sa vie quotidienne.

Le portrait d’un peintre dans l’exercice de son art. Il s’agit donc d’une exploration de l’activité artistique, de l’acte créatif, patient, minutieux, étiré dans le temps. Pas du tout le jaillissement de la forme sur le tableau. Il n’y a pas d’instantanéité dans cette création-là. Pas d’inspiration fulgurante qui tomberait du ciel – ou dont ne sait d’où. Mais un travail régulier, soutenu, par petits traits sur le papier, par petites touches de couleurs. Le fruit d’une concentration extrême. Et d’une observation minutieuse. Dans un parc par exemple, sous le regard étonné et presque moqueur des jeunes hommes qui fréquentent le lieu. Un lieu que le peintre affectionne particulièrement. Un lieu de rencontres. Et il évoque cette rencontre, faite là, qui a changé toute sa vie.

Le film de est bien en partie un regard sur Cuba, sur quelques-uns de ses habitants. Mais il y a relativement peu de plan de paysages, en dehors de la mer. Et la ville reste un arrière-plan un peu flou. La galerie d’exposition – à Paris  –  sera plus filmée, surtout les organisateurs et les visiteurs du lieu.

De même pour l’homosexualité. L’incipit du film nous montre bien la relation, le contact, de deux corps masculins sur une plage. Mais dans la majorité du film, Antoin est absent de La Havane. Les retrouvailles à Paris du couple sera pourtant filmée avec beaucoup d’émotion.

Reste l’art. La cinéaste nous propose quelques vues plein écran des œuvres du peintre. Mais c’est surtout le travail créatif qui l’intéresse. D’où les gros plans sur la plume qui trace des traits et sur les flacons d’encre et de couleurs. Et ceux sur le visage du peintre, qui essaient de capter son regard, et la flamme créatrice dans ses yeux. Mais le plus souvent ils se dérobent presque à l’inquisition de la caméra. Celle-ci alors sait rester discrète. Elle n’est insistante que sur les dessins en train de prendre forme. Art plastique et cinéma font alors parfaitement cause commune. Nous proposer un plaisir esthétique intense.

Festival International de Films de Femmes, 2021.

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

Laisser un commentaire