L COMME LUSSAS – Tënk

Le fils de l’épicière, le maire, le village et le monde. Claire Simon, 2020, 111 minutes.

Le cinéma documentaire a son village – un village qui rayonne dans le monde entier – Lussas en Ardèche. Connu d’abord pour les Etats Généraux du documentaire, un festival non compétitif qui regroupe chaque fin d’été tout ce que la planète documentaire compte de créateurs et de passionnée. Mais Lussas c’est aussi Ardèche image et ses formations (maters de production et de réalisations), la maison du documentaire et ses archives, la plateforme DocFilmDépot d’inscription des documentaires dans des festivals, et plus récemment, Tënk, la vod sur abonnement qui propose chaque mois une soixantaine de documentaires d’auteur visibles pendant deux mois.

C’est d’ailleurs l’aventure de Tënk que Claire Simon suit pas à pas, depuis la conception jusqu’au lancement, toutes les discussions au sein de l’équipe, toutes les études de faisabilité, les recherches de financements et les divergences de fond. La vie d’une équipe soudée au départ mais qui connait des dissensions allant jusqu’à la rupture. Une histoire mouvementée donc mais qui débouche sur le fonctionnement de cette expérience unique et irremplaçable dont la survie reste suspendue à l’augmentation du nombre d’abonnés. 6000 au moment du tournage du film alors que les prévisions espéraient 10 000. Mais Tënk a su devenir indispensable à la diffusion et à la connaissance du documentaire de création.

Le titre du film de Claire Simon est long, mais présente parfaitement son projet. Le fils de l’épicière, c’est Jean-Marie Barbe, omniprésent dans toutes les actions de Lussas, cheville ouvrière des Etats Généraux et de Tënk. A la fin du film on tremble avec ses amis pour sa santé.

Le Maire du village et Jean-Marie se connaissent depuis l’école. Ces deux figures de Lussas ont suivi des chemins différents, mais ils sont restés, l’un et l’autre, particulièrement attachés au Village et à sa région. Le Maire est resté agriculteur et nous le suivons, sur son tracteur, lors de la taille des fruitiers et de la vigne jusqu’aux vendanges. Le film ne fait nullement l’impasse sur la vie quotidienne du village et le travail de ses habitants. Même si une place plus importante est donnée aux événements cinématographiques, de l’ouverture des Etats Généraux à la visite de la ministre de la culture de l’époque venue poser la première pierre de la future maison du documentaire., une réalisation ambitieuse qui constitue avec Tënk le fil rouge du film. Si nous ne voyons pas la vie réelle de cette maison, nous pouvons en admirer l’architecture à la fin du film. L’avenir de Lussas est assuré.

Claire Simon avait réalisé précédemment une série de 20 épisodes, Le Village, consacrée à Lussas et à la création de Tënk. Le film actuel, ramenant le tout à presque deux heures, est un bel exercice de montage. Rien de ce qui fait la vie de Lussas n’est oublié. Après Le Garage (diffusé au Cinéma du réel en ligne), Claire Simon s’affirme de plus en plus comme la cinéaste de la ruralité, sachant parfaitement capter la quotidienneté des métiers traditionnels. Certes, le film est d’abord fait pour montrer ce qui se construit de fondamental à Lussas pour le cinéma documentaire, mais l’intérêt qu’elle porte aux habitants de l’Ardèche montre que le cinéma peut découvrir et montrer un réel passionnant sans partir à l’autre bout du monde.

Longue vie à Lussas et à Tënk !

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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