M COMME METIERS DU LIEN

Debout les femmes. Gilles Perret et François Ruffin, 2021, 85 minutes.

Après J’veux du soleil, le road movie à la rencontre des Gilets jaunes sur leurs ronds-points, le tandem de choc du film militant, Gilles Perret et François Ruffin, nous propose un nouveau road movie qualifié cette fois de « parlementaire », à la découverte des métiers du lien,  ces auxiliaires de vie, ces animatrice périscolaires, ces accompagnantes d’enfant en situation de handicap, ces agentes d’entretien, tous ces métiers féminins qui n’ont pratiquement pas de statut et surtout qui sont très mal payés.

Le film entremêle deux parcours bien différents.

Le premier est une aventure parlementaire, ou du moins une aventure vécue par deux députés, de bords différents, voire opposés, l’insoumis François Ruffin et le marcheur, Bruno Bonnell. Un duo désaccordé au départ à qui est confié une mission concernant donc les métiers du lien. Des auditions à l’assemblée ou au siège des associations, au vote dans l’hémicycle – ou plutôt au rejet par les députés des amendements proposés par Ruffin – en passant par la rédaction du rapport, nous suivons l’activité de ces deux députés qui finissent par s’entendre sur l’essentiel, malgré leurs différences d’appartenance politique, de style et de vocabulaire. Le film propose ainsi une connaissance, ou du moins une illustration, de l’exercice du pouvoir législatif. Un des deux protagonistes étant co-auteur du film, il apparaît bien vite que le film ne peut pencher que de son côté. Le travail parlementaire n’est pas vraiment glorifié. Est-il d’ailleurs bien utile puisque les propositions de Ruffin ne font pas long feu. Il y a dans tout ça une sorte de défiance, ce vers quoi tend d’ailleurs la fiction finale d’une assemblée entièrement féminine et s’exprimant sur les problèmes que ces femmes ont évoqués tout au long du film. « Debout les femmes » chantent-elles toutes en levant le poing, ce qui est d’ailleurs le seul moment qui peut justifier le titre du film, un film qui jusqu’à ce final n’est pas vraiment un appel à la révolte ou à la révolution.

Mais le plus intéressant c’est la deuxième direction que prend l’enquête menée par Gilles Perret. C’est la rencontre de ses femmes qui évoquent leurs conditions de travail et qui nous font pénétrer dans leur vie quotidienne. Leurs revendications portent en premier lieux sur les salaires, mais elles demandent aussi une reconnaissance sociale, que leurs métiers ne soient plus considérés comme des « petits boulots ». Toutes insistent sur les liens qu’elles créent avec des personnes âgées, souvent invalides, et qui ne pourraient plus rester chez elles sans leur aide. Toutes disent aimer leur métier, malgré la fatigue et les horaires démentiels et malgré les moments éprouvants qu’elles vivent par exemple dans l’accompagnement des personnes en fin de vie. Il y a dans leurs récits beaucoup d’émotion et de dévouement. Ce que le film rend tout simplement en les suivant dans leur tournée, jusque dans les cuisines ou les chambres à coucher.

Comme dans leur film précédent, François Ruffin est omniprésent dans Debout les femmes. De quoi ravir ses fans. Quant aux autres…

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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