Vers le sud. Johan van der Keuken. Pays Bas, 1981,
Vers le Sud est un carnet de voyage ; d’Amsterdam, la ville de toujours du cinéaste, jusqu’au Caire, en passant Paris, les Alpes, Rome, le sud de l’Italie. Cette traversée d’une partie de l’Europe pour aboutir en Afrique ne s’inscrit pas dans l’opposition courante entre le nord et le sud, pays riches / pays pauvres. Le propos de van der Keuken ne véhicule pas de tels clichés. Le cinéaste s’intéresse beaucoup plus directement aux problèmes concrets qui touchent les personnes particulières qu’il rencontre, et que le film érige en quelque sorte en archétype. Les difficultés de logement, l’immigration, les mutations de la vie rurale, la mafia, le surpeuplement des villes, sont ainsi successivement l’objet d’une exploration systématique et minutieuse, à travers un vécu spécifique mais dont la signification générale n’échappera à personne.
Tournage caméra à l’épaule par le cinéaste lui-même ; interviews cadrées en gros plan à base de questions simples et souvent répétitives ; nombreux plans de coupe et vues générales de paysages ; villes ou montagnes ; montage omniprésent mettant souvent en avant des séquences purement visuelles créant une ambiance très particulière ; utilisation parcimonieuse, et donc très efficace, de musique de jazz où le saxo domine le plus souvent ; telles sont quelques unes des caractéristiques du langage de van der Keuken. Vers le Sud permet en particulier de concrétiser ces différents points.
Beaucoup d’images peuvent laisser un souvenir marquant. La manif des squatters à Amsterdam. Le squatteur qui s’adresse à la police de la fenêtre de l’immeuble. La rue de la Goutte d’Or à Paris. Le couple de distillateurs de lavande devant leur maison. Les pieds de la vieille dame sur les marches de l’escalier à Rome. Un train dans une rue du Caire et les charrettes. Des villes bien différentes, dont le filmage n’hésite pas à faire ressortir les contrastes, le calme et la lenteur de l’immeuble de Rome par exemple opposés au bruit, à l’agitation et au désordre généralisé des rues du Caire. Du nord au sud nous pouvons avoir l’impression d’avoir changé d’univers. Mais le film ne nous révèle-t-il pas au fond ce qui est commun à l’humanité, la lutte pour la vie ?
