O COMME OTERO Mariana

Histoire d’un secret de Mariana Otero, 2003, 95 minutes.

L’histoire d’un secret de famille. Un secret bien gardé, sur lequel personne ne veut revenir. Un secret enfoui dans la mémoire des adultes ; un secret qui a été et est resté une énigme pour les enfants. Lorsqu’elle avait six ans, la mère de la cinéaste est décédée. Une mort abrupte, inexpliquée, d’autant plus tragique pour la petite fille qu’elle restera de l’ordre du mystère. Est-elle inexpliquée parce qu’inexplicable ? Dans la famille, cette mort est ce dont on ne peut pas parler, ce dont on ne doit pas parler.

25 ans plus tard, Mariana Otero a un moyen à sa disposition pour revenir sur ce secret, et essayer de mettre à jour la vérité. Ce moyen, c’est le cinéma. Le cinéma comme outil d’introspection personnelle et d’analyse familiale. Elle entreprend donc un film-enquête, rassemblant les éléments du puzzle et faisant advenir au plein jour ce qui est resté si longtemps dans l’ombre.

         Mais nous ne sommes pas dans un film de fiction. S’il y a suspens, c’est celui, particulier, inhérent à la dimension autobiographique du film. Menée par quelqu’un d’autre que la fille de la disparue, l’enquête du film aurait une tout autre signification. Mariana Otero ne détourne pas les codes du film policier à son profit. Elle crée une nouvelle forme de suspens cinématographique propre au film autobiographique.

Mais il y a plus. L’originalité du film, sa grande force, c’est sa dimension politique, c’est l’inscription du secret familial dans un enjeu social historiquement déterminé. La mère de la cinéaste n’est pas morte de la fatalité mais d’un avortement effectué dans les conditions précaires qui sont celles d’avant la loi de 1975.

Menant jusqu’à son terme, sans concession, son travail de révélation d’une vérité cachée, le film de Mariana Otero reste d’une grande sérénité. Il y a chez la cinéaste nul sentiment de révolte. Son film n’est pas une protestation s’élevant contre la partialité des lois humaines. Il montre cependant clairement la relativité de toutes valeurs.

La mère de la cinéaste était peintre et aurait pu connaître une grande carrière artistique. Le film sur le secret de sa mort aura un dénouement qui en sublime les conditions, le vernissage de l’exposition de ses œuvres qui n’a pas été réalisée de son vivant, mais que le cinéma porte à la connaissance universelle.

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Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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