Carnets de notes sur vêtements et villes. Wim Wenders. France, 1989, 78 minutes.
Le Centre Georges Pompidou à Paris propose un jour à Wim Wenders de réaliser un court métrage sur Yohji Yamamoto. Surprenant ! Mais c’est le cinéaste qui est le premier surpris. La mode, l’industrie du prêt à porter, ce n’est vraiment pas son truc. Pourtant, il va entreprendre de répondre à la demande. C’est pour lui l’occasion de partir à Tokyo et de filmer cette ville qui le séduit toujours autant. Ce sera aussi l’occasion d’une rencontre avec un artiste qui deviendra son ami.

Wenders va tenir une sorte de journal intime de ses voyages à Tokyo et de ses rencontres avec le couturier. Son film fonctionne alors à partir de deux mises en relation successives. D’abord les villes. Paris et Tokyo. Qu’est-ce qui les oppose. Qu’est-ce qui les rapproche ? Les images que Wenders propose des deux métropoles ont tendance à se confondre. Mêmes immeubles, même circulation. On passe de l’une à l’autre si rapidement qu’il faut être particulièrement attentif pour percevoir le changement imm00édiatement. Pourtant chaque ville a ses particularités. Comme le dit Yamamoto, il y a à Paris un air qu’il n’y a nulle part ailleurs.

La deuxième confrontation opérée tout au long du film porte sur les images. La nature des images. Wenders filme d’une part de façon traditionnelle en 35 mm, sur pellicule donc, mais aussi en vidéo avec une petite caméra dont les images n’auront plus du tout la même définition que les précédentes. Le film alterne dans le montage ces deux sources d’images, aussi bien à Paris qu’à Tokyo. Wenders s’interroge alors dans son commentaire sur la signification de cette évolution technologique. Pour la peinture, dit-il, les choses sont simples. Il n’y a qu’une œuvre originale et toutes les copies ne sont que des falsifications. Avec la photo et le cinéma, c’est-à-dire l’image argentique, les choses deviennent plus complexes. L’original est un négatif ; il n’existe pas sans copie. Ce sont les images multiples qui en sont tirées qui sont les vraies originales. Avec l’image électronique et digitale, il n’y a plus de négatif, plus de positif. Il n’y a plus de distinction possible entre l’original et la copie. C’est la notion même d’image originale qui disparaît.

Wenders propose lui un mélange des deux types d’images à sa disposition. Sur les autoroutes urbaines de Tokyo il filme dans sa voiture, la chaussée défile devant lui et il inclue dans cette image un petit écran vidéo, qu’il tient à la main, montrant une autre image. Ce dispositif simple d’image dans l’image, mais de deux images de nature différente, Wenders le reprendra dans certains entretiens avec Yamamoto, celui-ci n’apparaissant que dans cet enchâssement de l’image vidéo dans une image classique montrant son atelier.