Le dernier refuge. Ousmane Zoromé Samassékou, France-Mali-Afrique du sud, 2021, 85 minutes.
Une halte, un arrêt, un temps de repos, de respiration, pour reprendre des forces, dans le long voyage des africains candidats à l’immigration, qui pour la Libye, qui pour l’Algérie, avec comme but ultime l’Europe, l’Italie ou la France. Un refuge aux portes du Sahara, à Gao au Mali, Pour se reposer avant de plonger dans l’inconnu, le désert.

Se reposer, mais aussi et surtout réfléchir, faire le point et décider s’il faut continuer, poursuivre son chemin ou revenir en arrière, retrouver les siens, ceux qui ont été abandonnés, et ces conditions de vie qu’il fallait absolument quitter.
Dans ce havre de paix, le film se focalise en particulier, sur deux adolescentes, deux frêles jeunes filles de 16 ans, un peu perdues parmi tous ces hommes qui sont accueillis là, souvent parce qu’ils n’ont pas d’autre lieux où aller.

Nous suivons donc les diverses occupations qui peuplent leur séjour au Refuge de Gao. Dans leur chambre, étendue sur des matelas, elles consultent leur smartphone, et elles révisent leur leçon d’anglais. Dans la pièce commune, elles jouent aux échecs. Ou bien elles participent à ces réunions, pas vraiment des groupes de parole, où le responsable de l’accueil les incite à réfléchir sur leur situation et sur les dangers de l’expédition à travers le désert. Sans vouloir à tout prix les dissuader de continuer un voyage déjà périlleux, il veut surtout qu’elles ne partent pas sans avoir une idée la plus précise possible de ce qui les attend.

Le désert est omniprésent dans le film. Dans les discussions et dans les images, de longs plans fixes, sur les dunes, le sable, les cailloux, le vent. Des vues très belles bien sûr, mais qui ne peuvent faire oublier les dangers. Sauf lorsque le vent se lève, ces images sont très calmes, plutôt paisibles. D’ailleurs l’ensemble du film joue sur la lenteur, il n’y a pas de violence, presque pas de bruit même, en dehors d’une séquence où les hommes chantent, un rap qui ne rompt pas la teneur globale du film. Même la tempête de sable est plutôt brève. Elle n’est pas filmée avec insistance ni excès. Le Refuge a bien pour objectif de reconstruire la possibilité de la sérénité.

Pourtant, tout le monde ici sait bien que le Refuge n’est qu’une étape, une parenthèse, dans cette volonté de migrer qui ne peut être écartée, qui resurgit toujours tant elle est inscrite dans la vie même de ceux qui sont partis de chez eux, parfois en renonçant à donner des nouvelles, à garder le contact avec leur famille. Le film se clôt d’ailleurs sur le départ des deux adolescentes, seules, dans la nuit. Ce pourrait être un plan d’espoir. Mais il n’efface pas l’incertitude.
FIPADOC 2022, Biarritz.
