L’intérieur du corps.

De Humani Corporis Fabrica. Verena Paravel et Lucien Castaing-Taylor. 2022, 110 minutes.

Le duo Paravel-Castaing-Taylor nous a habitué à des films pour le moins surprenants, au sujet inédit (Caniba sur cet étudiant japonais qui dévora sa petite amie après l’avoir tuée) ou au filmage particulier comme ce bateau de pèche où la caméra placée sur la coque extérieure nous donne une vue unique sur la mer et ses vagues, ses oiseaux et ses poissons (Léviathan). Cette fois-ci, nous allons entrer dans le corps humain en suivant le travail des chirurgiens, avec des images que seules les techniques chirurgicales modernes nous permettent d’obtenir. Alors, parlera-t-on de plaisir visuel ? Peut-être. Mais certainement d’étonnement pour tous ceux qui n’appartiennent pas au monde médical. Quant au cinéma, il prouve une fois de plus sa capacité d’exploration de l’inconnu.

Mais la chirurgie n’est qu’une partie de l’hôpital. Et le projet de De Humani Corporis Fabrica est de pénétrer à l’intérieur d’un hôpital pour en donner une vue aussi complète que possible. Une approche qui peut s’apparenter à la méthode d’un Wiseman. Pas de commentaire, pas d’entretien ou d’interview, une exploration minutieuse de tous les coins et recoins du bâtiment, avec des plans séquences longs pour nous laisser le temps de nous imprégner de l’image. A quoi il faut ajouter un filmage particulier, alternant les plans fixes et les travellings caméra à l’épaule, des images ou presque rien ne bouge et d’autres saccadées, surchargées, foisonnantes de couleurs et de bruits.

Une fois entrés dans cet hôpital, à la suite d’un homme tenant un chien en laisse, nous n’en sortirons que pour la fête finale. Nous aurons fait le tour de bien des services, rencontré des parents, dans le couloirs, dans des chambres, sur des lits de réanimation, et dans le bloc chirurgical, sur la table d’opération.

Les opérations ? Une césarienne par exemple, où l’on voit l’ouverture du ventre et l’extraction (littéralement) du bébé. La pose aussi dans ce qu’on devine (mais en se trompant peut-être) être un thorax, de vis et broche en fer. Mais surtout le robot qui va chercher dans le colon une tumeur et qui l’empaquette (vraiment) dans un sac. Un travail qui paraît si simple ! En sortant de l’intérieur du corps humain, nous nous retrouvons dans le sous-sol de l’hôpital, en suivant deux membres de la sécurité dans ce qui est une sorte de tunnel (un boyau ?) aux murs recouverts de graffitis.

D’autres séquences sont moins éprouvantes visuellement, mais restent chargées d’inquiétudes et d’angoisse, malgré le calme apparent de ceux qui côtoient quotidiennement la maladie, la souffrance et la mort. Nous retrouvons par exemple la chambre mortuaire qui faisait l’objet du film de Camille Vidal-Naquet, La Chambre. Et nous ne pouvons sans doute éviter de penser qu’après tout, nous serons tous, un jour, un cadavre.

Léviathan : https://dicodoc.blog/2018/10/14/l-comme-leviathan/

Caniba : https://dicodoc.blog/2018/10/06/c-comme-cannibalisme/

La Chambre :  https://dicodoc.blog/2022/11/13/chambre-mortuaire/

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

Laisser un commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Image Twitter

Vous commentez à l’aide de votre compte Twitter. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

%d blogueurs aiment cette page :