M COMME MELILLA

Frontière sud. Joseph Gordillo, France, 2020, 73 minutes.       ,

Il existe au nord du Maroc deux enclaves espagnoles, Ceuta et Melilla, deux petits morceaux d’Europe en terre africaine. Deux villes qui ne peuvent qu’attirer les jeunes marocains rêvant d’une vie meilleure en Europe et décidés de quitter leur famille, leur pays et une vie sans travail, sans avenir, sans espoir. Atteindre ces terres espagnoles est déjà des plus périlleux. Mais le plus dur reste à faire. S’embarquer à bord d’un camion qui franchira la mer et leur ouvrira la porte du bonheur. Du moins le croient-ils.

Les Escales documentaires de La Rochelle 2020 avaient projeté Vidas minores d’Alfredo Torrescalles, filmé à Ceuta et montrant ces jeunes marocains mineurs survivant tant bien que mal derrière les murs qui les enfermaient dans un bout d’Espagne mais qui leur interdisaient le passage sur le continent européen.

Au Fipadoc de Biarritz, c’est à Melilla que nous rencontrons ces jeunes marocains mus par le même désir de partir et mettant toute leur énergie à chercher le moyen d’y parvenir.

Tous font le « risky ». Pas vraiment un sport, tant les solutions envisagées -sous les roues des camions – sont dangereuses. Ils sont en plus exposés à la répression de la garde civile qui les traque sans relâche avec leurs chiens dressés à les débusquer dans la moindre cachette. Un jeu de cache-cache dont ils sont le plus souvent perdants.

Joseph Gordillo dans Frontière sud filme longuement les hautes barrières qui entourent Melilla. Des vues impressionnantes. Malgré le soleil, la mer, le ciel bleu, ces jeunes Marocains sont bien en prison.

Séquence tout aussi frappante – et visuellement remarquable – toutes ces femmes qui portent sur le dos ou poussent devant elles, de gros ballot de marchandise (le film ne dit pas de quoi il s’agit exactement) qui échappe, parce qu’elles sont portées à pied, à la taxe marocaine. Un labeur quotidien particulièrement mal payé.

Si les jeunes marocains sont livrés à eux-mêmes à Melilla, il y a quand même un peu d’entraide dans la ville. Des distributions de nourriture ont lieu. Et surtout, le film montre une femme qui soigne sur la plage les plaies dues au risky – ou aux matraques de la police. Une solidarité qui tranche par rapport à l’indifférence générale qui règne par ailleurs dans la ville.

Fipadoc 2021

Vidas minores

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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