P COMME PASOLINI Pier Paolo

Notes pour un film sur l’Inde, Italie,1968, 36 minutes

Repérages en Palestine pour le film : « L’Évangile selon Saint-Matthieu ». Italie, 1965, 55 minutes

Deux films de Pasolini au travail. Avant tout tournage, l’affinement du projet, le développement de l’idée de départ. Et des repérages sur le terrain. Pasolini se rend donc en Inde avec un projet de film qui ne verra jamais le jour. En Palestine il parcourt les lieux où le Christ a vécu et prêché. Un travail d’observation indispensable dans le long processus qui aboutira au film L’Evangile selon Saint Matthieu.

En Inde, Pasolini se concentre sur deux thèmes, la religion et la faim. Il filme donc la misère, et les souffrances, les pieds et les mains déformé.e.s par la lèpre par exemple. Il pose la question de la surpopulation. Pour résoudre le problème, faut-il en arriver à une solution radicale, un vaste plan de stérilisation ? Pasolini semble ne pas prendre position.

Le fil qu’il suit tout au long de son film réside dans une légende selon laquelle un Maharadjah aurait offert son corps pour nourrir un tigre affamé. Il pose la question à plusieurs hommes religieux. Feraient-ils de même ou existe-t-il des hommes qui le feraient. La plupart des interrogés ne se prononcent pas, Ou bien quand ils donnent une réponse, elle est négative.

Le film se termine par une cérémonie funéraire, le cortège qui défile en portant le corps et la mise en feu du bûcher. Pasolini ne fait pas de commentaire. Les images parlent d’elles-mêmes.

En Palestine, sur les pas du Christ, de Nazareth à Jérusalem, en passant par le lac de Tibériade et la Mer Morte, Pasolini – très présent à l’image – observe, interroge, recueille des impressions et met à l’épreuve de la réalité les idées qu’il se faisait a priori du pays et de ses habitants. Pourra-t-il trouver des figurants ? Et sur le terrain pourra-t-il filmer des paysages qui ne soit pas déformés par la modernité et l’industrie ? Et surtout, faudra-t-il vraiment venir filmer ici, alors qu’il est possible de trouver des paysages identiques en Italie. Des paysages désertiques, désolés, qui doivent être essentiels pour le film qu’il a en tête.

Le film a un côté road movie, avec ses vues de paysages filmés depuis l’intérieur d’une voiture. Aux arrêts, Pasolini dialogue avec un prêtre à propos de la vie du Christ. En Israël, il interroge les membres d’un kibboutz. Une femme donne son point de vue sur l’éducation des enfants et un homme explique le fonctionnement socialiste et le type de vie communautaire mis en œuvre. Nous sommes bien loin de la réalité actuelle du pays.

Ces deux films ne peuvent pas être considérés comme de simple making off, puisqu’ils ne sont pas réalisés. Celui sur l’Inde ne le sera d’ailleurs jamais. Il s’agit bien plutôt de véritables documentaires où un cinéaste s’interroge, in situ, sur son cinéma. Une introspection en images à laquelle peu de réalisateurs se sont livrés avec autant de pertinence et de sincérité.

Deux films proposés dans le cycle (accessible en ligne) de la Cinémathèque du documentaire de la BPI intitulé Pasolini, Pasoliniennes, Pasoliniens ! Un cycle qui se propose de redécouvrir les documentaires de Pasolini et de mettre en évidence l’influence que le cinéaste-écrivain-poète peut avoir sur des cinéastes contemporains. A suivre donc.

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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