S COMME SURDITÉ – Musique.

Le journal d’une femme sourde. Franck Cassenti, 2021, 55 minutes.

Lily a perdu l’audition à la suite d’une maladie. Ce qui lui manque le plus dans ce monde du silence qui est le sien dorénavant, c’est la musique. Pourra-t-elle un jour retrouver les sensations qu’elle éprouvait alors. Mais sa surdité est définitive, totale et définitive.

Pourtant, sa vie de femme sourde va basculer le jour où elle rencontre Cassandra.

Cassandra est chercheuse. Elle vient de mettre au point un instrument spécial, une « body bass » qui devrait permettre aux personnes non-entendante de ressentir les vibrations émisses. Une façon adaptée de rentrer en quelque sorte dans la musique.

Lily va se prêter à l’expérimentation de l’instrument. Et c’est là que le film de Frank Cassenti est précieux. Il aborde le problème du handicap avec une grande rigueur et beaucoup de sérénité. Il ne s’agit pas de rechercher une solution, par exemple mécanique, à la limitation des capacités sensorielles par quoi se traduit le handicap. Il s’git plutôt de contourner cette limitation, et de trouver une voie nouvelle, parfaitement inédite, permettant la réception de sensations à travers des vibrations musicales, celles d’une batterie électronique et celles de la body bass.

Nous suivons Lily dans toutes les étapes de ce travail. Sa découverte de l’instrument, les premiers essais, ses hésitations et la progression dans la maîtrise qu’elle acquiert peu à peu dans la production de sons, même si elle ne les entend pas, et la réception de véritables sensations musicales. Flute traversière, guitare, batterie et chant, une véritable formation musicale se constitue, qui répète inlassablement jusqu’à pouvoir donner un concert dans une salle de cinéma à La Ciotat, celle-là même où fut projeté pour la première fois le film des frères Lumière. Plus qu’une consécration. La joie profonde de Lily rayonne sur son visage. Plus de doute, pour elle la musique a vaincu le handicap !

Le film de Cassenti, au-delà de la recherche menée par Cassandra, est un portrait tout en nuances de cette jeune femme, Lily, frappée par le handicap, et qui va savoir saisir cette opportunité inimaginable de devenir « musicienne ». Le cinéaste lit des fragments du journal rédigé quotidiennement par Lily, un journal d’une écriture simple mais émouvante, comme les poèmes dont elle fait elle-même la lecture. Des textes d’une grande force expressive.

Le cinéaste s’implique personnellement dans la quête de Lily et dialoguant avec elle et avec ses partenaires musiciens. Son film devient au fil des images des instruments, un film musical qui est une extraordinaire célébration du plaisir de la musique.

Par jean pierre Carrier

Auteur du DICTIONNAIRE DU CINEMA DOCUMENTAIRE éditions Vendémiaire mars 2016. jpcag.carrier@wanadoo.fr 06 40 13 87 83

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